Communiquer avec du sens: logotype et site Internet
J’ai toujours été « marqué » par les images publicitaires. On m’a fait collectionner des pin’s et des porte-clés, expression des logos de marques. De là, je retiens par exemple les marques Bébisol, Dinky Toys, Milka, Omo, Dove, Jacques Vabre, Europe 1. Il y a une forme de jouissance dans l’analyse de l’image. Et ça tombe bien: communiquer avec du sens est fondamental, indispensable. A chaque marque, j’applique le triple filtre sémantique, sémiologique et symbolique. Et ce triple filtre s’est installé sur tout ce que je vois, lis ou écoute, notamment sur les sites Internet, pour les logotypes, en édition, en communication publicitaire. Explications.
La découverte de l’inconscient, du fait que « l’inconscient est structuré comme un langage », par Jung, a renforcé cette démarche. On remarque tous les lapsus et les actes manqués de son entourage, y compris ceux des peintres ou graphistes, au travers de l’expression même de leur production. Un des aspects de mon métier réside assez naturellement en la maîtrise des signes émis par une entreprise, une institution, ou une personne, chef d’entreprise ou homme politique. J’analyse alors tout ce qui se passe, dans la presse, sur Internet. Et en premier lieu, le discours d’un chef d’entreprise, ses collaborateurs. Puis ce que projettent les signes et le discours d’une marque. Le logotype et le site Internet n’y échappent pas.
Il existe deux façons de créer le graphisme d’un site Internet ou d’un logotype: faire de l’imagerie, c’est-à-dire une image certes agréable à regarder, mais dénuée de sens. Ou faire un logotype au sens grec du terme: résumer graphiquement ce que dit l’entreprise (logos, discours et typos, écriture). L’écriture formalisée du discours implique un logotype qui traduit la vision d’un chef d’entreprise, d’un politique, d’une entreprise publique, d’un groupe international, d’une PME locale, d’une région, d’un pays, d’une institution. Bref, d’une entité qui regroupe des hommes et des femmes : car « faire un logo » ou « refaire son site » porte quelque chose de profondément humain. Je ne connais pas de bon site Internet réalisé par une équipe désintéressée par l’activité humaine.
Le manque de repères sociétaux est corrélé à la production de logotypes et de sites non-signifiants, donc souvent gadgets. Les mauvaises écoles de design tout comme les écoles de commerce n’enseigne pas la symbolique, la sémiologie, ni même la typographie, alors que chaque lettre est elle-même un symbole (la lettre A est le symbole de la maternité!). Les graphistes arrivent à se copier, dans des banques de données image. En communication digitale, mon agence veille aux symboles qui accompagnent tout acte de communication. Aux couleurs, elles-mêmes signifiantes. Mais aussi au discours d’une marque, à ce qu’elle exprime au-delà du logotype et de la page d’accueil d’un site Internet: la mise en page, la rédaction de contenus.
Par rapport à une image, je parle de démarrage narratif. Autrement dit, j’aime pouvoir me raconter une belle histoire au travers d’un site Internet, et même d’une page d’accueil d’un mobile. A partir d’un logotype aussi. Et j’ai la chance de travailler avec des personnes qui intègrent aussi bien l’informatique, le développement, le graphisme, les techniques de communication et… la compréhension d’une marque. Certains relient cela au brand content, d’autres au storytelling.
Lesieur, par exemple, a son histoire. La Vache qui rit vous emmène dans un univers narratif. Ou AXA, dont le logotype traduit la crucifixion (le X représente le Christ, les deux A les brigands, le trait rouge l’ascension quittant la terre bleue et carrée). Orange, qui d’une façon très simple, par distorsion sémantique, réunit le carré (cartouche du logotype) et le cercle (l’orange est ronde), signifiant l’universel. Vous me direz : « Qu’est-ce que ça change ? « , ou « n’en fait-il pas trop? ».
Non. Un investissement dans un site Internet ou dans un logotype est plus productif si nous y ajoutons du sens.